Fer sérique et ferritine

QUAND FAUT-IL DOSER LE FER SÉRIQUE ET LA FERRITINE
ET QUELLES CONCLUSIONS FAUT-IL EN TIRER ?

Pr Bruno VARET

Chef du service d’Hématologie Adultes - Groupe Hospitalier Necker-Enfants Malades, GHU Ouest
Université Paris Descartes
19ème Journée de cochin - 2008
Une regrettable confusion s’est installée depuis quelques années quant à la place respective du dosage de la ferritine et du dosage du fer sérique dans le diagnostic. L’idée s’est répandue que le dosage de la ferritine était à même de dépister aussi bien la carence martiale que la surcharge en fer. Or, s’il est exact qu’un taux de ferritine abaissé témoigne pratiquement à coup sûr d’une déplétion des réserves de fer, un taux de ferritine élevé a de nombreuses autres explications que la surcharge martiale. De facto, la pratique immodérée du dosage de la ferritine conduit un nombre croissant de patients à consulter en Hématologie pour aboutir au diagnostic cliniquement évident … de surcharge pondérale ou d’alcoolisme. D'autre part, il ne faut jamais prescrire un dosage isolé du fer sérique mais toujours y associer la prescription de dosage de la transferrine (ou sidérophiline).
Il faut donc prescrire ces examens à bon escient et en fonction de la question posée :
    • Si le problème posé est celui dudiagnostic d’une anémie macrocytaire, la prescription la plus informative est celle du dosage du fer sérique et de la sidérophiline (ou transferrine).
      Ces deux dosages, associés à celui de la CRP, permettent de discuter trois situations :
      1. Anémie par carence martiale (fer diminué, sidérophiline augmentée),
      2. Anémie inflammatoire (fer sérique diminué, sidérophiline normale ou diminuée, CRP augmentée),
      3. Anémie microcytaire ou microcytose non hyposidérémique, justifiant la prescription de l’électrophorèse de l’hémoglobine.
    • Si la question posée est celle du suivi d’une anémie par carence martiale, la prescription du dosage de la ferritine après 4 mois de traitement est un excellent moyen de juger de la réplétion des réserves (normalisation de la ferritine). La poursuite du suivi tous les six mois permet de dépister une éventuelle récidive, témoignant d’une persistance de la cause.
    • Si la question posée est celle de la fréquence de la carence martiale dans une population (enquête épidémiologique), le dosage de la ferritine peut être utilisé aussi bien que le dosage associé du fer et de la sidérophiline.
    • Si la question posée est celle du dépistage de l’hémochromatose, il y a un consensus formel sur le fait que le bon test n’est pas le dosage de la ferritine mais, là encore, le dosage du fer et de la sidérophiline avec calcul du coefficient de saturation. Si le fer sérique est élevé avec un coefficient de saturation à plus de 45 % chez la femme ou plus de 50 % chez l’homme, c’est le phénotype d’une surcharge martiale dont il faut rechercher la cause, génétique ou acquise.
    • Si la question posée est celle du suivi de l’efficacité d’un traitement de surcharge en fer, que ce soit par un chélateur du fer chez un patient transfusé ou des saignées chez un patient ayant une hémochromatose génétique, le meilleur test est le dosage de la ferritine, la cible à atteindre étant un taux de ferritine inférieur ou égal à 50 ng/ml.